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Christoblog

Illusions perdues

Deux points rendent le film de Xavier Giannoli particulièrement intéressant : une écriture au millimètre et un casting d'enfer.

Sur le plan du script, le film est formidable. La complexité balzacienne est respectée dans l'esprit, même si le contenu du roman est assez profondément modifié. 

Giannoli parvient habilement à insérer des résonances contemporaines dans la trame narrative profondément romanesque du livre.

Côté interprétation, c'est du haut niveau. Tout d'abord, c'est une excellente idée d'avoir confié le rôle principal à un acteur peu connu, Benjamin Voisin (qu'on a quand même vu dans Eté 85 et surtout le très bon La dernière vie de Simon). De cette façon, on peut parfaitement s'identifier à l'odyssée du jeune provincial découvrant Paris. Vincent Lacoste est parfait dans son rôle de beau gosse cynique, et Xavier Dolan est formidable d'ambiguïté. Cécile de France, Salomé Dewaels, Gérard Depardieu, Jeanne Balibar, André Marcon ne sont pas en reste.

Comme la direction artistique est très propre (un peu trop ?) et la mise en scène sage et solide, le film est un divertissement tout à fait agréable, même si le rendu final l'apparente plus à une excellente production télé qu'à une véritable oeuvre de cinéma. On passe un très bon moment et le rythme enlevé du film rend sa durée (2h30) tout à fait supportable.

Xavier Giannoli sur Christoblog : A l'origine - 2008 (*) / Marguerite - 2015 (***) / L'apparition - 2017 (**)

 

3e

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Tralala

A l'évidence, il faut être sensible au cinéma à la fois transgressif et amical des Larrieu et/ou aimer les oeuvres barrées pour apprécier Tralala.

En ce qui me concerne je coche les deux cases. Pas d'hésitation, vous êtes bien dans le même univers que 21 nuits avec Pattie : des situations improbables, de la cocasserie, un petit air champêtre, le plaisir sexuel féminin mis à l'honneur. La patte de la fratrie est bien là, dans sa veine comédie, exaltant le plaisir de vivre et l'amitié, et ne reculant pas devant une mise en avant benoîte du mauvais goût (ici, le décor incroyable de Lourdes, par ailleurs ville natale des cinéastes).

Au-delà du script barré (un clochard se fait passé pour un fils disparu, façon Martin Guerre), le traitement vaut aussi le détour. Le film est en effet une comédie musicale écrite par, excusez du peu, Dominique A, Philippe Katerine, Etienne Daho, Jeanne Cherhal, Bertrand Belin ! Ce dernier impose d'ailleurs en tant qu'acteur sa présence magnétique. Quelques passages sont délicieux, dont celui chanté par Mélanie Thierry (cf ci-dessus), véritablement explosive.

Bref, j'ai pris mon pied en étant tour à tour ému, surpris et séduit, mais je ne vous garantis pas que ce sera la même chose pour vous.

 

3e

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Le dernier duel

Beaucoup de choses ne m'ont pas convaincu dans Le dernier duel.

L'utilisation de l'effet Rashomon par exemple me semble plus handicapant que séduisant. Les trois versions se complètent, se répètent, présentent quelques subtiles variations, mais ne se contredisent pas vraiment. On ne voit donc pas trop l'intérêt d'étirer le film de cette façon.

J'ai également été un peu sonné par cette photographie sans cesse bleutée et comme sous-exposée, et parfois déstabilisé par la façon un peu vulgaire dont le film se veut résolument "post Metoo" (exemple : the truth qui reste incrusté à l'écran à l'introduction du troisième chapitre), d'autant plus que le personnage de Marguerite est finalement le moins développé des trois.

Bref, beaucoup de réserves, et pourtant une impression persistante d'un beau morceau de cinéma. L'aspect appliqué et immersif du film doit y être pour quelque chose. Les interprètes sont tous et toutes très bons, et la mise en scène souveraine. Quant au combat final, il est beaucoup plus impressionnant que n'importe quelle scène du dernier Bond (et là au moins, les gens saignent quand ils sont blessés).

A voir si vous n'êtes pas rebuté par sa durée : 2h33.  

 

3e

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Mourir peut attendre

Rien ne va dans ce dernier Bond de l'ère Craig.

Mourir peut attendre est un tunnel d'ennui profond dans lequel on assiste hébété à des conversations interminables sur des sujets psycho-philosophico-romantiques sans aucun intérêt, entrelardées de scènes d'action quelconques.

Le scénario part progressivement en quenouille, on a l'impression d'avoir vu les scènes finales des milliers de fois (l'île bunkérisée est un décor surexploité) et ce qui frappe le plus, c'est l'absolu manque d'originalité de l'ensemble.

Quant à l'évolution de Bond, qui de héros aux ressources insoupçonnables devient un papa ému ("j'ai perdu mon doudou"), elle casse l'aspect mythique de la série, pour n'en faire qu'une comédie sentimentale / action comme les autres. La piteuse prestation de Léa Seydoux n'y est d'ailleurs pas pour rien.

Seuls pauvres rayons de soleil dans cet océan de médiocrité, la pétillante Ana de Armas, véritable révélation, et le décor splendide de la ville de Matera, en Basilicate.

Mourir n'attend plus, contrairement à ce qu'annonce le titre mensonger, et tant mieux, car depuis le premier Bond tourné par Craig, le bon Casino Royale, toute la production a été décevante, marquée par une lente "nolanisation" du propos et de l'esthétique.

A fuir.

James Bond sur Christoblog : Quantum of solace - 2008 (*) / Skyfall - 2012 (**) / 007 Spectre - 2015 (*) 

 

1e

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Julie en douze chapitres

Pour ceux qui, comme moi, avaient été éblouis par Oslo 31 août, il avait été cruel de voir Joachim Trier se perdre au fil de ses films suivants, tous plus ou moins ratés.

Julie en 12 chapitres permet de retrouver le cinéaste norvégien dans ce qu'il a de meilleur : une grande sensibilité dans l'exploration des sentiments et des états d'âme, des idées de mises en scène renversantes (la merveilleuse scène dans laquelle le monde entier se fige) et une capacité à renouveler sans cesse l'intérêt du spectateur.

Il y a une forte probabilité pour que ce film devienne culte pour les spectateurs, et encore plus spectatrices, qui ont l'âge de Julie (en gros, les trentenaires). Il dessine en effet une sorte de Carte du Tendre de cette génération, entre hésitations, expérimentations et réalisation de soi-même. C'est souvent réussi (le chapitre "Infidélité") et aussi parfois un peu moins enlevé (les chapitres de la fin à propos d'Aksel).

On retrouve avec plaisir l'acteur d'Oslo, le magnétique Anders Danielsen Lie, et on découvre la pétillante Renate Reinsve, prix d'interprétation féminine à Cannes cette année. Cette dernière irradie le film comme rarement une actrice peut le faire.

Un film primesautier, bien qu'assez peu original, qui semble saisir l'essence même de la vie. A découvrir.

Joachim Trier sur Christoblog : Oslo, 31 août - 2012 (****) / Back home - 2014 (**) / Thelma - 2017 (*)


2e

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Nine perfect strangers

La dernière production de la petite plateforme US Hulu, à qui on doit entre autres The handmaid's tale, est une déception.

Cela commençait pourtant plutôt bien : neuf personnes se rencontrent dans un lieu paradisiaque pour régler des problèmes psy sous la direction d'une Nicole Kidman plus flippante que jamais.

Il y a dans les deux premiers épisodes un petit air de Lost qui intrigue et encourage à poursuivre. On a hâte de découvrir ce que chacun cache dans son passé, les interactions entre les neuf personnes promettent d'être palpitantes, la nature est splendide et il plane globalement une aura de fantastique au-dessus de tout cela.

Malheureusement, le scénario s'enfonce dans une série de facilités, de redondances et de cul-de-sac. On se fout un peu de l'explication finale, les relations entre les personnages ne se développent finalement pas et la série prend bien trop rapidement un biais qu'elle ne quittera plus : tout le monde est sous l'emprise de drogues, ce qui permet tout aux scénaristes mais ne donne finalement aucune profondeur à l'intrigue.

Nine perfect strangers se délite progressivement sans qu'aucun événement ne parviennent à nous intéresser, et pire que cela la série finit par agacer par sa vulgarité clinquante. C'est bien dommage, d'autant plus que le casting est exceptionnel : Melissa MacCarthy, Michael Shannon et Bobby Cannavale sont en particulier très bons.

 

1e

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Gaza mon amour

Pourtant présenté à Toronto et à Venise, et porté par de bonnes critiques, Gaza mon amour m'a déçu.

Le film des frères Nasser (encore une fratrie de cinéastes !) juxtapose deux histoires sans grand rapport : un pêcheur d'un certain âge trouve un bronze antique d'une part, et il cherche à se marier avec une femme de son âge qui travaille dans un magasin de vêtement d'autre part.

Le film, plan-plan, est assez roublard pour passer pour le film "qui montre Gaza sous un autre jour", mais il possède en réalité tous les attributs du film d'auteur pour festival : rythme ralenti, plans savamment composés et allusions politiques. Il ne présente pas d'intérêt spécial d'un point de vue sociologique et ne génère pas d'émotions. Il échoue également dans la veine burlesque qu'il semble esquisser par moment. Il est par contre plutôt réussi d'un point de vue esthétique, bien qu'un peu poseur.

A vous de juger.

 

2e

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Cigare au miel

Pas toujours évident de dire ce qui ne va pas dans un film. 

Cigare au miel possède par exemple tous les ingrédients pour plaire : un portait a priori sympathique d'une jeune bourgeoise issue d'une famille laïque d'origine berbère, des péripéties dramatiques, des acteurs impliqués.

Pourtant rien ne va dans le film, qui cherche à embrasser trop de sujets : le plaisir féminin et l'émancipation sexuelle, le machisme traditionnel qui aboutit à un viol, les relations à l'Algérie pour les enfants d'immigrés, le terrorisme, une sociologie des écoles de commerce. Rien n'est habité, tout est esquissé. 

Zoé Adjani (la nièce d'Isabelle) fait ce qu'elle peut, mais son personnage est trop faiblement écrit pour vraiment convaincre. Cigare au miel est peut-être tout simplement mal conçu (l'écriture part dans tous les sens et les situations semblent souvent artificielles) et mal réalisé (il manque de rythme et d'unité).

Une réalisation insipide au service d'enjeux insignifiants.

 

1e

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Flag day

On avait laissé Sean Penn à Cannes avec un film qui peut sans beaucoup d'hésitation être qualifié de pire film jamais vu en compétition, le calamiteux The last face, qui avait suscité en 2016 quolibets et critiques féroces sur la Croisette, comme aucun autre film auparavant.

Flag day est objectivement moins mauvais, mais reste marqué par les mêmes défauts que son lamentable prédécesseur : montage lourdingue, manque de profondeur des personnages et des situations, aspect clippesque de la mise en scène, caractère sirupeux des émotions, plans inutiles. 

Le sujet est parfaitement anecdotique (le père d'une journaliste est un escroc, and so what ?). Je me suis ennuyé fermement et j'ai été dubitatif de voir le père et la fille Penn jouer un père et une fille, transformant indirectement le spectateur en psy indiscret.

Vous m'avez compris : Flag day est vulgaire et mal fagoté, même si Penn s'y avère être un acteur assez convaincant. Vous pouvez éviter.

 

1e

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Cette musique ne joue pour personne

Je ne suis habituellement pas du tout friand de l'ambiance des films de Samuel Benchetrit, que je trouve trop froids et distanciés. J'ai en particulier détesté Asphalte.

C'est donc avec une certaine appréhension que j'ai découvert son dernier film au Festival de Cannes, en juillet dernier.

Peut-être est-ce l'ambiance de la Croisette, ou la présence dans la salle de l'équipe (impressionnant JoeyStarr !), mais j'ai cette fois-ci trouvé le film plutôt plaisant, notamment grâce à l'interprétation délicieuse du toujours parfait François Damiens.

Tout n'est pas bon, loin de là, et la machine tourne toujours un peu à vide, mais les lumières et les ambiances du Nord donnent ici une substance légèrement poétique au film, qui le rend plus chaleureux que les précédents. J'ai beaucoup aimé en particulier le couple JoeyStarr / Bouli Lanners en Réservoir dogs franchouillards, alors que Kervern m'a, comme d'habitude, laissé assez froid. L'insert aux airs de fable décalée, dans lequel Vincent Macaigne se fait adopter par une famille indienne, est hilarant. 

Un divertissement plutôt réussi, qui confronte habilement éléments contemporains (réseaux sociaux, télé-réalité) et bon vieux clichés de salut par l'art "à l'ancienne" (poésie, théâtre).

Samuel Benchetrit sur Christoblog : Asphalte - 2015 (*)

 

2e

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Les intranquilles

J'aime assez le cinéma de Joachim Lafosse, que je trouve habituellement solide et profond.

Le sujet dont il s'empare ici est intéressant : il s'agit de montrer de façon réaliste ce qu'est la bipolarité, et d'en explorer les conséquences sur la sphère familiale. Le film suit scrupuleusement ce programme, d'une façon sage et appliquée. On assiste donc à l'évolution oppressante des troubles comportementaux, impuissants comme tous les proches, qui font par ailleurs preuve d'une grande bienveillance.

Les intranquilles porte la marque habituelle de Lafosse : les situations sont bien analysées, le rapport entre les personnes sont décrits avec beaucoup de finesse, et la direction d'acteurs est convaincante. Damien Bonnard est exceptionnel, donnant à voir la maladie uniquement par son degré de fébrilité plus ou moins élevé, sans recourir à d'expressives mimiques.  

Un film honorable donc, sans être exceptionnel, qui souffre peut-être de quelques longueurs et d'un scénario hésitant sur la façon de finir le film, mais qui mérite d'être vu.

Joachim Lafosse sur Christoblog : A perdre la raison - 2012 (***) / Les chevaliers blancs - 2015 (**) / L'économie du couple - 2016 (**)

 

2e

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