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Christoblog

Vers un avenir radieux

En 2021, Nanni Moretti s'était révélé sacrément mauvais perdant, en déclarant à propos de la Palme d'or, Titane : "Vieillir soudainement. Ca arrive. Surtout quand un de vos films participe à un festival. Et qu’il ne gagne pas. Et au lieu de ça, c’est un autre film qui gagne dont le premier rôle tombe enceinte d’une Cadillac. Tu vieillis d’un coup. Bien sûr."

Impossible pour moi de ne pas repenser à cette déclaration lors des scènes de Vers un avenir radieux dans lesquelles Moretti s'énerve contre un réalisateur tournant ce qu'il juge être des scènes de violences gratuites. 

A ce moment-là, le réalisateur italien semble effectivement tout à coup pencher du côté de la ringardise : sa charge grossière contre un cinéma spectaculaire et violent (qui est celui de Ducourneau, Bong Joon-Ho ou même Tarantino) tombe à plat, révélant probablement ce qu'il pense vraiment sous couvert d'un second degré bien commode.

Tout le dernier film de Moretti m'a paru triste, expression désabusée d'une longue boursouflure d'ego, ressassant des obsessions qui étaient charmantes à l'époque de Journal intime (les balades en deux roues dans le quartier, le communisme), mais sont devenues désormais plutôt énervantes. Comme un vieil oncle dont les plaisanteries entendues mille fois ne font plus rire. Avec le temps, le caractère acariâtre de Moretti, qui charmait à ses débuts par son caractère asocial et original, est devenu une rengaine sans grâce de vieil homme, ne proposant plus grand-chose de neuf.

L'autodérision n'est pas charmante quand elle n'est plus légère. 

Je ne mets pas la note la plus basse parce que je remémore les attachements passés, et que le ton Moretti fait encore ponctuellement mouche (comme lors de la scène chez l'ambassadeur), mais j'ai été déçu. 

 

2e

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Omar la fraise

Omar la fraise commence plutôt bien. La plongée qu'il propose dans une Alger inaccoutumée, mix de petite délinquance décontractée et de convivialité exubérante, est plutôt agréable.

Dans ce contexte de pieds nickelés sans prétention on est prêt à beaucoup pardonner au couple Reda Kateb / Benoit Magimel, excellents tous les deux, y compris l'introduction d'une mièvre histoire d'amour. La formidable utilisation des décors naturels d'Alger donne beaucoup de charme au film d'Elias Belkeddar, qui prend parfois des airs de tragi-comédie à l'italienne.

Malheureusement, le fragile équilibre du film se délite assez rapidement, par la faute d'un scénario qui tourne en rond, puis choisit des voies totalement improbables, qui détruisent son charme. 

C'est dommage, car il y avait de quoi faire avec tous ces ingrédients un portrait doux-amer de malfrats à la petite semaine, dans un décor formidable.

On guettera avec attention le deuxième film d'Elias Belkeddar.

 

2e

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Stars at noon

Pas facile de défendre (un petit peu) ce film fragile de Claire Denis, tant il cumule de faiblesses et d'approximations.

Alors, OK, son scénario filandreux n'est pas passionnant, son propos est ténu, ses développements approximatifs, son intrigue confuse et son rythme émolient.

Mais il me faut avouer, à rebours de la majorité de la critique, que j'ai été assez sensible à l'histoire d'amour naissant entre les deux personnages joués par l'excellente Margaret Qualley (une future grande, c'est clair) et Joe Alwyn. J'ai rarement eu cette sensation de voir un sentiment éclore à ce point à l'écran.

L'autre point fort du film, c'est la moiteur qui baigne le film, une moiteur symbolique et physique à la fois, qui m'a vaguement rappelé les romans de Graham Green et de Malcom Lowry, moiteur qui imbibe une atmosphère de complot permanent, d'embrouilles politique et de faux-semblants tropicaux.

Tel un cocktail bien chargé en rhum et arrosé par le score toujours délicieux des Tindersticks, le film m'a gentiment enivré, et bercé dans une molle torpeur dans laquelle l'apparition irréelle de Benny Safdie m'a ravi.

Un petit plaisir coupable, bien imparfait.

Claire Denis sur Christoblog : Les salauds - 2013 (**) / Un beau soleil intérieur - 2017 (**)

 

2e

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Asteroid city

Si vous avez trouvé comme moi que les derniers Wes Anderson commençaient à ressasser la même recette, alors n'allez surtout pas voir Asteroid city.

Le dernier opus de Wes Anderson apparaît en effet comme une compilation à bout de souffle de tout son cinéma précédent, dans lequel tous les effets bien connus sont égrenés d'une manière presque robotique : couleurs pastels jaunâtres, personnages hiératiques qui semblent manipulés comme le seraient des marionnettes, mise en abyme arty, effets de symétrie en veux-tu en voilà, split screen, discours verbeux, détails dans tous les coins du cadre, etc.

A quoi tout cela sert-il ? Voilà la question que je me suis posé tout au long du film, qui ne génère aucune émotion, n'intrigue pas, ne surprend pas, et en un mot, ennuie.

Même les dialogues, qui souvent chez Anderson font mouche, semblent ici tristement amidonnés, comme l'unique décor, dont l'artificialité géométrique m'a rebuté. On en vient à scruter sans grand intérêt les petits nouveaux entrant dans la famille, et en particulier Scarlett Johansson, assez fade en Marilyn de cire.

Tout cet attirail formel et froid illustre des thèmes qui ne m'ont pas intéressé (l'Amérique éternelle, la famille, le théâtre des années 50). Même l'extra-terrestre est tristounet.

Un raté total pour moi, que les plus passionnés des fans consacreront peut-être comme le summum de Wes Anderson, considérant que le "système" du cinéaste trouve ici sa réalisation la plus aboutie.

Wes Anderson sur Christoblog : La vie aquatique - 2003 (*) / A bord du Darjeeling Limited - 2007 (***) / Fantastic Mr. Fox - 2009 (****) / Moonrise kingdom - 2012 (****) / The grand Budapest hotel - 2013 (**)  / L'île aux chiens - 2018 (****) / The french dispatch - 2021 (**)

 

1e

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L'odeur du vent

Pas très facile d'expliquer ce que ce film a d'exceptionnel, si on le considère dans un premier temps uniquement sous l'angle de son synopsis : un électricien tente de dépanner l'installation d'un homme handicapé en trouvant (difficilement) la bonne pièce.

Si on ajoute le fait que le film doit comprendre une quinzaine de lignes de dialogue en tout (dont la moitié constituées de "Salam") et vous comprendrez que L'odeur du vent n'est pas le film le plus facile à conseiller.

Pourtant, cela faisait longtemps que je n'avais pas été ému de cette façon. Les plans tout d'abord sont tous, sans aucune exception, composés d'une façon admirable. Non seulement les paysages iraniens sont de toute beauté, mais la lumière, le cadrage et la durée de chaque plan rendent l'expérience de vision du film particulièrement immersive. La prise de son est également fantastique.

Si chaque scène est un véritable petit tableau, leur enchaînement mutique amène à ce qu'on se pose rapidement une question : pourquoi notre héros fait-il tout ça ? Et la réponse est toute simple : par bonté d'âme. Pour aider son prochain, sans en attendre de remerciements. C'est un argument fragile, mais qui remplit le film de la même façon qu'un gaz remplit une bouteille vide quelque soit sa quantité : la bonté irradie le film de bout en bout, lorsque un homme cueille un bouquet de fleur pour un aveugle, comme lorsqu'un autre répare silencieusement une voiture.

Une leçon de vie magnifiquement mise en image. A découvrir de toute urgence.

 

3e

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Love life

Le dernier opus de Koji Fukada (Suis-moi je te fuis / Fuis-moi je te suis) nous avait laissé un peu sur notre faim. Le format série resserré pour le cinéma ne fonctionnait pas très bien.

Avec Love life, le réalisateur japonais revient à ce que l'on préfère chez lui : une mise en scène élégante, une écriture au scalpel et des événements qui bousculent simultanément les personnages et les spectateurs.

Le film commence ici comme le tableau en demi-teinte d'un couple presque normal : elle a un enfant d'une première union, il a des parents un peu envahissants qui habitent dans l'immeuble d'en face. On sent vaguement que quelque chose d'anormal plane au-dessus de la famille : une curieuse cérémonie d'anniversaire pour le beau-père, l'ex petite amie du mari qui réapparaît, des paroles acerbes qui s'échangent.

Le style Fukada est là : le regard d'un entomologiste qui observe des fourmis humaines se débattre dans le labyrinthe de la réalité, se heurtant à leurs sentiments, leurs désirs, et surtout ici, leur culpabilité.

Dans Love life, la communication semble impossible entre les principaux personnages. La mise en scène excelle à décrire leur isolement par de multiples et subtils procédés : plan lointain, jeu de transparence et de reflets, bande-son travaillée. A l'image du sublime dernier plan, le maximum de connivence qui semble accessible dans ce monde absurde, c'est de marcher un petit bout de chemin l'un à côté de l'autre.

Un beau film, ample et délié, riche en signes et en symboles.

Koji Fukada sur Christoblog : Au revoir l'été - 2014 (***) / Harmonium - 2017 (****) / L'infirmière - 2019 (***) / Suis-moi je te fuis, Fuis-moi je te suis - 2022 (**)

 

3e

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Festival du film d'animation d'Annecy 2023

 

C'est avec beaucoup de plaisir que je retrouve cette année le festival, son ambiance à la fois professionnelle et décontractée, ses avions en papier, son cadre idyllique, ses échanges cosmopolites, et sa programmation pléthorique (plus de 400 films, courts-métrages compris).

 

11 juin

C'est la première fois que le festival ouvre un dimanche, puisque cette année il a été rallongé d'une journée. La cérémonie d'ouverture est évidemment marquée par l'émotion causée par l'attaque au couteau qui s'est déroulée il y a trois jours. A travers les différents discours, le festival s'affirme comme une force d'amour et d'acceptation de la différence, face à la barbarie.

En apéritif, nous avons droit à un court-métrage des studios Disney en exclusivité mondiale. Once upon a Studio est basé sur une idée simplissime : il s'agit de prendre une photo de famille des personnages emblématiques de Disney. Ainsi se croisent dans ce court-métrage les très anciens et les plus modernes, de Mickey à la Reine des neiges en passant par Robin des Bois, et des dizaines d'autres. C'est rythmé, amusant et même émouvant : chaque génération s'y retrouve. L'animation est simplement parfaite.

Nous voyons ensuite le nouveau film de Benoit Chieux, Sirocco et le royaume des courants d'air (2/5), qui sera LE gros film d'animation français du Noël 2023. Il s'agit d'un projet original, qui rappelle les productions du studio Ghibli, notamment par son imagination débordante en terme de formes et de couleurs (avec en particulier un bestiaire de toute beauté). L'histoire, qui aborde plusieurs thèmes, est assez solide. J'ai des réserves sur la qualité de l'animation assez sommaire, et sur le manque de caractérisation des personnages qui empêche de pleinement s'impliquer émotionnellement dans le film. C'est une grande différence avec le meilleur de la production d'animation actuelle, comme Suzume.

 

12 juin

Robot dreams (4/5), de l'espagnol Pablo Berger (Blancanieves) est un petit miracle comme seule l'animation peut en produire. Comment est il possible de captiver le spectateur avec l'histoire de l'amitié d'un chien et d'un robot, dans un New-York habité par les animaux, sans aucun dialogue, et pendant 1h30 ? Le film explore toute une gamme de sensation et d'émotion par la seule force de l'animation et de la mise en scène : solitude, bonheur partagé, espérance, nostalgie, tristesse, résignation. C'est très beau, et loin d'être simpliste.

Le film de fin de soirée est plus ardu. Il s'agit là encore d'un OVNI, dans un tout autre genre. Art college 1994 (3/5), du chinois Liu Jian, présenté à Berlin, raconte le spleen d'étudiants chinois en art plastique, dans les années 90. Pas d'action, de longues conversations sur Matisse et Kant, une sourde envie d'Amérique, une incapacité à vivre sa vie et avancer dans ses projets. C'est d'un point de vue visuel parfois magistral, avec une animation très proche de la prise de vue réelle. Une expérience hors du commun, lors de laquelle l'émerveillement n'est jamais très loin de l'ennui le plus profond, et réciproquement. 

 

15 juin

Ce soir, je découvre le film de Chiara Malta et Sébastien Laudenbach, Linda veut du poulet (3/5), qui faisait partie de la sélection ACID Cannes 2023. Le film est plein d'idées intéressantes, d'un point de vue narratif comme de celui de l'animation (très comparable à celle de La jeune fille sans main). Il s'agit d'une sensible chronique qui raconte le deuil d'une vive petite fille qui a perdu son papa. Le ton est attendrissant et cocasse, et les dialogues sont parfaitement incarnés par Esteban, Clotilde Hesme  et Laetitia Dosch. Il manque un petit quelque chose pour que je sois complètement convaincu : un rythme un peu plus soutenu, un trait plus incisif ou une fantaisie plus débridée.

Et voilà, c'est fini pour cette année, à l'année prochaine !

 

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L'île rouge

Il y a beaucoup de films dans L'île rouge, qui me plaisent plus ou moins.

Le premier, et le plus important, est la vision par un enfant de sept ans de la vie familiale dans une base militaire française de Madagascar. Ce film-là est plutôt réussi. Les états d'âme des adultes, l'intrication de l'imaginaire et du réel, les subtils décalages liés à la sensibilité de l'enfant (que ses frères et son père traite ostensiblement de gonzesse) : tout cela est bien rendu par Campillo, qui règle ainsi quelques comptes avec son enfance.

Mais il y a dans L'île rouge beaucoup d'autres films, qui me plaisent moins et qui ne s'allient pas très bien avec le propos principal. En vrac : des aventures de Fantômette mises en image d'une façon assez laide, des incises sensorielles comme dans 120 battements par minute (le gravier, les paysages, l'oeil de crocodile), et enfin une parenthèse politique en fin de film qui ne semble pas connectée avec la première partie, ni par la forme, ni par le ton.

La mayonnaise n'a pas pris dans mon esprit et après avoir été agréablement surpris par le début du film, j'en suis progressivement sorti. Le jeu des acteurs, un peu artificiel à mon goût, et l'absence d'interaction avec la vie de la base militaire ont également contribué à me laissé en dehors du projet proposé.

Une déception.

Robin Campillo sur Christoblog : Eastern boys - 2013 (**) / 120 battements par minute - 2017 (**)

 

2e

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My love affair with marriage

Au festival d'animation d'Annecy 2022, j'avais été accueilli à l'entrée d'une des salles du Pathé par une grande femme rayonnante qui m'avait tendu une carte postale promotionnelle, et m'avait souhaité bon film. La Lettonne Signe Baumane accueillait ainsi en toute décontraction les quelques spectateurs de son film (nous n'étions pas très nombreux).

My love affair with marriage est à l'image de sa réalisatrice : vif, enjoué, direct. Il regorge aussi d'imagination : effets visuels variés et plaisants, utilisation de la musique pour quelques scènes de comédie musicale irrésistibles, personnages délicieusement croqués.

On suit avec délectation les tribulations de Zelma, dans un voyage à la fois physique (la Russie profonde, la Lettonie, le Danemark), biologique et d'émancipation. Ses différents mariages, en incluant tentatives avortées et remariage, sont très drôles à suivre, et on ne s'ennuie pas une seconde dans ce périple intérieur qui mène une petite fille de sept ans à se libérer progressivement pour devenir une jeune fille de vingt-neuf ans.

Un formidable film, accessoirement d'animation.

 

3e

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Concours La romancière, le film et le heureux hasard : Gagnez 2 DVD (Terminé)

l'occasion de sa sortie, je vous propose de gagner 2 exemplaires du DVD du film de Hong Sang-Soo, La romancière, le film et le heureux hasard.

Pour ce faire :

- répondez à la question suivante : dans quel autre film de HSS l'actrice Lee Hyeyoung a-t-elle joué ?
- joignez votre adresse postale
- envoyez moi le tout par ici avant le 14 juin 20 h.
 

Un tirage au sort départagera les gagnants. Vous recevrez ensuite le DVD envoyé par le distributeur. NB : un des deux DVD sera attribué par tirage au sort à un participant ayant aimé ma page FB ou mon compte Twitter ou s'étant abonné à la Newsletter du blog (n'oubliez pas pour participer à ce tirage au sort spécial de me donner votre pseudo dans votre réponse, pour que je fasse le lien).

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L'amour et les forêts

On ne retrouve rien du style déjanté des premiers films de Valérie Donzelli dans cet exercice très sage de mise en image du roman d'Eric Reinhardt.

On sait que l'auteur a eu maille à partir avec la lectrice qui lui a inspiré cette histoire (l'affaire s'est soldée par un accord à l'amiable) : il est d'autant plus surprenant de constater que le résultat à l'écran est d'une incroyable neutralité. On est loin de songer à une histoire vraie, mais on a plutôt l'impression d'être devant la description minutieuse d'un cas archétypal.

Dans le cadre un peu formaté du film, au style très froid, Virginie Efira fait merveille en femme à la fois soumise puis finalement résistante et Melvil Poupaud s'avère être un salaud d'envergure, peut-être un peu trop désagréable dès les premiers plans. Le film est très écrit et bien réalisé. Il ne parvient toutefois pas à générer une véritable émotion (peut-être du fait de l'effet de flash-back qui annonce finalement assez tôt comment l'histoire va évoluer).

On appréciera toutefois la façon dont le mécanisme implacable de l'emprise est disséqué, à travers toutes ses composantes, et dans la durée.

A voir, ne serait-ce que pour Virginie Efira (et pour sa jumelle !).

Valérie Donzelli sur Christoblog : La reine des pommes - 2009 (**) / La guerre est déclarée - 2010 (****) / Main dans la main - 2011 (**) / Marguerite et Julien - 2015 (*)

 

2e

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