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Christoblog

The guilty

The guilty est un film-concept. Il est bâti sur une idée simple : la caméra ne quitte à aucun moment le personnage principal (quasiment seul à l'écran), un policier en pleine dépression, qui réceptionne les appels d'urgence au téléphone. 

Comme pratiquement tout film de ce genre, il est à la fois porté et limité par l'idée qui préside à son origine : on est d'abord intrigué par la façon dont le réalisateur Gustav Möller va faire évoluer son intrigue en respectant la règle qu'il s'est lui-même imposé, puis un peu lassé par les ficelles épaisses qu'il est au final obligé d'utiliser.

Le scénario, même s'il faiblit un peu sur la fin, est toutefois assez habile et permet de maintenir l'attention jusqu'au twist médian, efficace malgré son caractère un poil attendu. L'acteur Jakob Cedergren porte le film sur ses épaules avec une solide efficacité et la réalisation de Gustav Möller rappelle le meilleur des séries danoises (alternance de focales, d'ambiance et de cadres). Il utilise brillamment les ressorts dramatiques qu'offrent les conversations téléphoniques qui font avancer l'intrigue (fausses pistes, bande-son inquiétante, silences)

Jake Gyllenhaal vient d'acheter les droits du film danois. Un remake américain est donc à prévoir, bien que je n'en voie pas du tout l'intérêt.  

Un thriller compact et divertissant.

 

2e

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Une affaire de famille

Je suis la carrière d'Hirokazu Kore-Eda depuis tellement d'années que cette Palme d'Or 2018 me ravit. Elle récompense pour moi l'un des cinq meilleurs réalisateurs vivants, pour un de ses meilleurs films.

Tout est parfait dans Une affaire de famille. La photographie est superbe, la mise en scène comme d'habitude à la fois discrète et élégante, l'interprétation incroyablement puissante et le scénario bien plus complexe que ce que le synopsis ou la bande-annonce peuvent laisser penser.

Quelle qualité dans l'écriture de ce film, quelle subtilité et quelle délicatesse dans le montage ! Chaque nouvelle scène donne un éclairage nouveau sur l'un des personnages. Le film avance ainsi d'une manière millimétrique, suscitant à la fois l'émerveillement et la réflexion. 

On sait que la famille et les sentiments sont les deux grands sujets de Kore-Eda. Ce dernier opus mène les réflexions du réalisateur vers une intensité et une profondeur extrêmes sur ces deux sujets. Le scénario brasse tout au long du film les différentes images de la famille et de l'affection, remuant et bousculant nos certitudes. Normalité et moralité se renvoient la balle d'une façon tellement subtile que j'ai été subjugué par là où parvenait à m'amener au final Kore-Eda. La façon dont se clôt le film est réellement superbe. Tout ce qu'on a vu auparavant est alors nimbé d'une lumière à la fois froide, tendre et nostalgique.    

C'est très beau. 

 

4e

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Pupille

Pupille aurait pu être un documentaire intéressant. La manière dont Jeanne Herry expose tous les rouages administratifs qui mènent de l'accouchement sous X à l'adoption est en effet riche de découvertes (le constat rédigé par l'assistante sociale, la famille d'accueil transitoire, etc).

Le rythme du film, qui mène son récit sur un tempo de thriller, contribue à capter l'attention du spectateur.

Malheureusement, cette sécheresse évocatrice de la trame narrative est inutilement gâchée par des acrobaties scénaristiques (le bébé va beaucoup mieux une fois que l'assistante sociale lui a parlé de sa maman), des atermoiements longuets (le visage de bébé est au film ce qu'est le chaton à certains comptes Facebook) et des intrigues annexes accessoires (le crush de Karine / Sandrine Kiberlain pour Jean / Gilles Lellouche). 

Pupille perd ainsi de sa force dramatique pour verser dans un pathos qu'il fait initialement mine d'éviter. C'est dommage, car Jeanne Herry possède un réel talent de réalisatrice.

 

2e

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The Mumbai murders

On peut se demander pourquoi Edouard Waintrop, l'excellent délégué général de la Quinzaine des Réalisateurs de 2011 à 2018, s'est entiché de cet obscur cinéaste indien au point de lui offrir régulièrement une vitrine cannoise.

Waintrop a en effet proposé en quelques années dans sa programmation l'immense fresque Gangs of Wasseypur, Ugly, puis Raman Raghav 2.0, qui sort plus d'un an et demi après son exposition cannoise sous le nom de The Mumbai murders.  

Anurag Kashyap est un cinéaste de la démesure maîtrisée. On retrouve dans son cinéma la même exubérance que dans les films de Bollywood, mais elle est ici mise sous contrôle au service de genres plus conformes à nos goûts d'occidentaux : le thriller, le film policier, l'horreur.

Ce dernier opus est donc dans la lignée des précédents. On ne s'ennuie pas à suivre le périple d'un tueur en série plutôt jovial ("Je tue par passion"), qui parle avec Dieu et cherche un alter ego. Il est poursuivi par un flic plutôt antipathique, pourri, junkie et insomniaque.

Là où le film trouve rapidement une limite, c'est dans le désir forcené de nous imposer un point de fuite évident dès le départ : les deux personnages sont les mêmes, ils se valent. Le scénario, qui avance à marche forcée vers la conclusion de cette idée, manque en conséquence de subtilité. Restent à porter au crédit du film les imposantes scène tournées au sein des quartier pauvres de Bombay, qui sont formidables.

A voir si vous aimez ce type de cinéma indien décomplexé et jamais très loin du mauvais goût.

Anurag Kashyap sur Christoblog : Gangs of Wasseypur - 2012 (**) / Ugly- 2013 (**)

 

2e

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Les confins du monde

Avec ce film, Guillaume Nicloux se rate dans les grandes largeurs. D'une certaine façon, le projet est à la base plus que casse-gueule : porter ses pas dans ceux de Coppola ou Cimino avec un casting incluant Gaspard Ulliel et Guillaume Gouix, c'est osé. Le film n'a pas les moyens de ses ambitions.

Dès le premier plan, très long, très formel, le réalisateur s'affiche comme le Grand Créateur de ce qu'on va voir. Avec le second plan du film, une vision bien trash de charnier, il prend le spectateur en otage. La suite des Confins du monde va sans cesse actionner ces deux ressorts  ("Vous allez déguster" et "Regardez-moi filmer") tout en accumulant les poncifs sur la guerre, la jungle et la vie : les Viets sont des salauds, les serpents ça pique, les putes ont en fait un grand coeur.

En dépit d'une production qu'on devine onéreuse, le film ne fait pas vrai, il est peu incarné et donne à voir des personnages improbables (Depardieu en médecin désabusé) et des péripéties hasardeuses. On pense bien sûr à Apocalypse Now, mais au lieu des hélicos et de Wagner, on a le sexe d'Ulliel et une pauvre batterie de jazz. Pas vraiment la même dimension.

Guillaume Nicloux sur Christoblog : Valley of love - 2015 (***)

 

1e

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Leto

Leto est un bel objet, qui plaira aux esthètes, aux journalistes de rock, aux défenseurs de Kirill Serebrennikov (le réalisateur du film, persécuté par le pouvoir russe), aux fans d'Iggy Pop, aux lecteurs des Inrocks (qui a priori doivent cocher toutes les cases précédentes).

En ce qui me concerne, et le jury du dernier Festival de Cannes a pensé la même chose que moi, j'ai été à la fois intéressé par cette reconstitution de l'URSS pré-glasnost et un peu ennuyé par ce qui m'est apparu comme une molle chronique de personnages peu intéressants. Alors, au risque de m'attirer les foudres des nombreux admirateurs du films, je dirais que j'ai trouvé la musique jouée vraiment quelconque, l'intrigue amoureuse peu intense et le film beaucoup trop long (2h06 pour ne pas raconter grand-chose).

La mise en scène est virtuose, à l'image de la première scène, mais on sent un peu trop qu'elle se sait virtuose. De temps en temps Serebrennikov essaye de rompre la monotonie de sa chronique par une sorte de clip foutraque dans lequel les personnages tentent de s'échapper de leur quotidien. A base d'incrustations assez laides (un procédé qui rythmait déjà son film précédent), le réalisateur rend hommage à des morceaux phares du rock occidental des années 70 (Lou Reed, Iggy Pop). Ces effusions plastiques (auxquelles il faut ajouter écrans splittés et tics divers) empêchent l'émotion et rendent Leto un brin prétentieux.

Chronique biographique de deux artistes, tableau politique, recension d'un mouvement artistique naissant, chronique sentimentale intimiste : Leto essaye sans succès d'être tout ça à la fois, pour ne ressembler au final qu'à un exercice de style sûr de sa force.

 

2e

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La permission

J'ai beau aimer les cinémas du Sud en général et le cinéma iranien en particulier, je dois avouer que le film de Soheil Beiraghi m'a un peu déçu.

Certes, on retrouve ici les qualités qu'on trouve presqu'à coup sûr dans les films en provenance de Téhéran : sûreté de la mise en scène, excellente direction d'acteurs, mise en relief de la complexité des relations humaines.

Mais cette histoire d'une joueuse de futsall empêchée de sortir de son pays par un mari mécontent (tirée d'un fait réel) est un peu trop simple pour remplir tout un long-métrage. Le scénario use donc de différents subterfuges pour que le temps s'écoule : une course poursuite un peu ridicule et qui apparaît en déphasage avec le reste de l'intrigue, des atermoiements répétitifs et des scènes trop longuement étirées.

La permission se laisse toutefois regarder comme un témoignage supplémentaire sur la condition de la femme en Iran. Sur une thématique proche (le pouvoir discrétionnaire d'un mari sur une femme libre, dans une société corsetée) était montré avec bien plus d'intensité dans le formidable film de la regrettée Ronit Elkabetz, Le procés de Viviane Ansalem.    

 

2e

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Concours DVD Nobody's watching (Terminé)

A l'occasion de sa sortie, je vous propose de gagner 3 exemplaires du DVD du film de Julia Solomonoff, Nobody's watching. 

Pour ce faire :

- répondez à la question suivante : "De quelle nationalité est la réalisatrice Julia Solomonoff ? "

- joignez votre adresse postale

- envoyez moi le tout par ici

avant le 11 décembre 20 h.

Un tirage au sort départagera les gagnants.

Vous recevrez ensuite le DVD envoyé directement par le distributeur.

NB : un des trois DVD sera attribué par tirage au sort à un participant ayant aimé ma page FB ou mon compte Twitter ou s'étant abonné à la Newsletter du blog (n'oubliez pas pour participer à ce tirage au sort spécial de me donner votre pseudo dans votre réponse, pour que je fasse le lien).

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Un amour impossible

Je n'attendais pas grand-chose de ce film : Catherine Corsini m'a parfois déçu, Christine Angot m'insupporte et si j'aime bien Virginie Efira, force est de constater que sa carrière n'en est encore qu'à ses débuts.

Le choc éprouvé hier après-midi n'en est que plus grand.

Commençons par la prestation des acteurs et actrices. Virginie Efira est magnifique, alternant détermination positive, douleur intériorisée et candeur amoureuse avec une classe incroyable. J'ai vraiment eu l'impression d'assister dans Un amour impossible à la naissance d'une très grande actrice, de la classe de Catherine Deneuve par exemple. Le reste du casting est parfait: Niels Schneider sidérant en salaud séduisant, Jehnny Beth incroyable de vérité en Chantal adulte. Le moindre des seconds rôles (la soeur de Rachel, ses collègues de bureau, l'ami mauricien, le père de Philippe) semble parfaitement à sa place.

La mise en scène de Catherine Corsini est ensuite brillante. Les mouvements de caméra sont à la fois inspirés et signifiants, ce qui est bien le propre des grandes réalisatrices. Pour ne donner qu'un exemple, la discussion entre Rachel et sa fille dans le café parisien est un grand moment de cinéma : les lentes oscillations de la caméra, très proche des deux visages, sont bouleversantes.

Il y a dans Un amour impossible une alchimie parfaite entre la direction artistique (quelle belle restitution de chaque époque !), la rigueur de la mise en scène et du montage, l'intensité de la progression dramatique et la densité du jeu des acteurs.

Le résultat est qu'on est littéralement emporté dans cette histoire terrible et haletante, souvent ému au larmes et confondu par ce sentiment d'une vie qui s'écoule sous nos yeux. C'est superbe.

Catherine Corsini sur Christoblog : Trois mondes - 2012 (**) / La belle saison - 2015 (***)

 

4e 

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Diamantino

Je suppose que le kitsch poussé dans ses dernières extrémités peut trouver des amateurs. 

En ce qui me concerne, les aventures de ce clone de Ronaldo bête comme ses pieds ne m'ont pas intéressées du tout. Les chiots géants (et roses) à long poil qui l'accompagnent sur le terrain lors de ses dribbles m'ont laissé de marbre. 

Il y a dans le film une telle volonté de faire n'importe quoi et de le faire mal que cela en devient gênant. J'ai éprouvé en tant que spectateur ce qu'on éprouve à un repas de famille quand un cousin un peu bourré fait une imitation ratée : on a à la fois pitié de lui et on lui en veux de nous obliger à le regarder. 

Les réalisateurs portugais Gabriel Abrantes et Daniel Schmidt font du sous-Miguel Gomes, en cochant laborieusement toutes les cases d'une bonne conscience sociale et se voulant esthétiquement marginale : sensibilité queer, sujets de société abordés par la bande (migrants, clonage, extrême-droite), esthétisme rétro-ringard.

Le résultat est une monstruosité de mon point de vue. Il faut être fan de série Z regardée au troisième degré pour apprécier ce burlesque au petit-pied.

 

1e

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Concours blu-ray Kitano (Terminé)

Je vous propose de gagner 3x2 blu-rays des films qui ont fait connaître Kitano en France

Attention, vous ne pouvez jouer que pour un seul des trois films

Pour ce faire :

- répondez à la question suivante si vous jouez pour Violent cop : "Comment s'appelle le personnage principal du film ?"

- répondez à la question suivante si vous jouez pour  Jugatsu : Quel âge a aujourd'hui Kitano ?

- répondez à la question suivante si vous jouez pour Sonatine : "Dans quelle île se passe une partie de l'action ?"

- joignez votre adresse postale

- envoyez moi le tout par ici

avant le 10 décembre 20 h.

Un tirage au sort départagera les gagnants.

Vous recevrez ensuite le blu-ray envoyé directement par le distributeur.

NB : trois des six blu-ray sera attribué par tirage au sort à un participant ayant aimé ma page FB ou mon compte Twitter ou s'étant abonné à la Newsletter du blog (n'oubliez pas pour participer à ce tirage au sort spécial de me donner votre pseudo dans votre réponse, pour que je fasse le lien).

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Le jeu

Fred Cavayé n'est pas un cinéaste très fin, ni dans sa mise en scène, ni dans ses scénarios.

Cela se vérifie dans cette tragi-comédie qui rappelle furieusement Le prénom dans son agencement (un repas de copains durant lequel les masques tombent), en beaucoup moins bien écrit.

On appréciera donc principalement dans Le jeu les performances d'acteur. Grégory Gadebois est impérial, le couple Bérénice Béjo / Stéphane de Groodt touchant, et Suzanne Clément comme d'habitude explosive. 

Si l'idée de départ est amusante (que se passerait-il si on avait libre accès au téléphone de ses amis durant toute une soirée), les développement sont assez poussifs et prévisibles. On rit un peu et on est surpris deux ou trois fois. Pour le reste les ficelles scénaristiques sont un peu grosses et le pied-de-nez final assez déstabilisant.

Pour résumer : un film de dimanche soir, loin d'être indigne, mais dispensable.

Fred Cavayé sur Christoblog : A bout portant - 2010 (**)

 

2e

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Concours DVD The strange ones (Terminé)

A l'occasion de sa sortie, je vous propose de gagner 3 exemplaires du DVD du film de Christopher Radcliff et Lauren Wolkeistein, The strange ones. 

Pour ce faire :

- répondez à la question suivante : "Dans quel Festival (en quatre lettres) ce film fut-il projeté en première mondiale ? "

- joignez votre adresse postale

- envoyez moi le tout par ici

avant le 6 décembre 20 h.

Un tirage au sort départagera les gagnants.

Vous recevrez ensuite le DVD envoyé directement par le distributeur.

NB : un des trois DVD sera attribué par tirage au sort à un participant ayant aimé ma page FB ou mon compte Twitter ou s'étant abonné à la Newsletter du blog (n'oubliez pas pour participer à ce tirage au sort spécial de me donner votre pseudo dans votre réponse, pour que je fasse le lien).

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Amanda

Encensé par la critique et le public, Amanda a tout pour plaire au plus grand nombre : une narration limpide, une interprétation incarnée, un sujet dramatique et des situations à forte charge émotionnelle.

Difficile donc de ne pas adhérer à ce récit centré sur un jeune homme de 23 ans apprivoisant tout doucement l'idée de devenir le tuteur de sa jeune nièce, dont la mère a été tuée dans un attentat.

Mikhaël Hers est un cinéaste de la litote. Il évite ainsi de montrer de nombreuses scènes clés (les démarches administratives ou médico-légales) pour se concentrer sur le récit de l'intime et des sentiments. Mais alors que dans ses films précédents (Ce sentiment de l'été, Memory Lane) sa retenue pouvait confiner à la préciosité, il parvient ici à recentrer son propos sur une dramaturgie suffisamment explicite pour être émouvante. Son talent d'évocation, qui est grand, trouve donc un terrain d'expression parfaitement adapté dans cette belle et simple histoire. Hers a un talent indéniable pour filmer Paris en été. 

Vincent Lacoste exprime une palette d'émotions qu'on ne lui connaissait pas encore. La petite Isaure Multrier est confondante de naturel et Stacy Martin trouve probablement ici un de ses meilleurs rôles.  

Beaucoup d'aspects positifs dans Amanda, qui force le respect et fait inévitablement couler quelques larmes.

 

3e

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Yomeddine

Difficile d'imaginer un sujet plus casse-gueule que celui de Yomeddine : un lépreux guéri mais défiguré part à la recherche de ses racines en carriole, à travers l'Egypte, suivi par un orphelin. On imagine à l'avance tout le potentiel de trop que recèle le synopsis : trop de mélo, trop de misère, trop de pittoresque. 

Le jeune réalisateur AB Shawky parvient pourtant à éviter (presque) tous les écueils possibles. Son film n'est pas le pensum misérabiliste qu'on pourrait craindre, mais plutôt une sorte de version moderne de Candide : le voyage de Beshay, un homme simple, révèle plus de choses sur le monde contemporain que sur lui-même.

Un certain nombre de critiques, avec une condescendance pas tout à fait exempte de néo-colonialisme, se moque de la façon dont est fait le film (i.e. avec très peu de moyens, forcément). Ils ignorent avec une féroce mauvaise foi l'imagination dont fait preuve le réalisateur dans sa mise en scène (les scènes de rêve, la bande-son, la construction des plans).

J'ai été pour ma part emporté par l'émotion ressentie devant la construction de la relation entre le lépreux et le jeune garçon, par le plaisir procuré par le rythme impeccable du film et par les sourires que génèrent plusieurs situations tragi-comiques "à l'italienne" (comme l'évasion avec l'islamiste menotté). 

Un film à découvrir.

 

3e

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Les bonnes intentions

Les bonnes intentions est un film qui se moque de tout le monde, qui joue avec les clichés pour mieux les détourner et qui n'hésite pas à flirter avec le mauvais goût.

Gilles Legrand et sa scénariste Léonore Confino manient de la nitroglycérine humoristique, en se moquant des bobos (peut-être ce pourquoi la presse parisienne boude le film), en faisant d'une gentille prof allemande la petite-fille de Heinrich Himmler, et en se moquant gaillardement de différentes origines et religions.

Si le film tient parfaitement debout, c'est parce que la rigueur de l'écriture est exceptionnelle. Du premier plan (des réfugiés prennent des prospectus pour des cours de français afin de les brûler pour se réchauffer) au dernier, le script est remarquablement rythmé. Les personnages évoluent tout au long de la narration, et notre perception des différentes attitudes change en conséquence, comme par exemple lors de la très belle scène du mariage en Bosnie.

Les bonnes intentions est à la fois drôle, grinçant et touchant, à l'image d'Alban Ivanov qui, de film en film (Le sens de la fête, Le grand bain), affirme un potentiel comico-tragique de très haut niveau, un peu dans la lignée de Jacques Villeret. 

Un divertissement de qualité.

 

3e

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The spy gone north

Le réalisateur Yoon Jong-bin montre dans ce film à quel point le cinéma coréen peut être puissant et efficace quand il s'empare d'un thème et d'un genre.

The spy gone north est en effet au film d'espionnage ce que The strangers fut au film d'épouvante il y a deux ans : il commence comme un classique du genre avant de s'envoler vers tout autre chose.

On est ici saisi devant la complexité apparente du scénario, que le montage resserré et efficace éclaircit au fur et à mesure. Les jeux de pouvoir, l'influence de la politique, la longueur et la dangerosité de la mission menée par l'agent Park : tous ces éléments contribuent à faire de ce long film dense un sommet de l'année 2018 en matière de thriller. 

Comme souvent chez les cinéastes coréens, la mise en scène est racée et rudement efficace, alors que la direction artistique est extraordinaire. Les rencontres avec le dictateur nord-coréen donnent l'occasion à l'équipe du film d'élaborer des plans mémorables : les lumières, décors, figurants, et accessoires sont impressionnants.

The spy gone north commence comme un film d'espionnage et finit comme un drame sentimental doublé d'un brûlot politique. C'est passionnant.

 

3e

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Bohemian rhapsody

Qu'on soit fan de Queen ou pas, Bohemian rhapsody est intéressant, comme tout biopic bien construit et correctement réalisé.

On suit donc d'une façon assez didactique le parcours habituel de l'apprenti rocker : débuts difficiles, moments cruciaux lors desquels toute une carrière se joue, premiers succès, influence néfaste de l'entourage, déchéance, dissensions dans le groupe.

On cherchera en vain un angle original, un point de vue nuancé (le film est produit par deux anciens du groupe) ou une exploration des influences artistiques de Queen. Bryan Singer se contente de suivre une storyline très balisée et sans surprise, cumulant les anecdotes dont on pourra douter de la véracité au détriment d'une réflexion plus profonde. Le film s'accommode de beaucoup d'erreurs (en voici une liste assez complète) : par exemple le fait que Fat bottomed girls n'était pas encore écrit au moment de la première tournée US, ou encore que la maladie de Mercury n'a été diagnostiqué que deux ans après le Live Aid.

Bohemian rhapsody ne vise qu'à impressionner et à émouvoir, et il le fait finalement plutôt bien. Les reconstitutions de concerts sont époustouflantes et il est difficile de ne pas écraser une petite larme devant l'interprétation incroyable de Rami Malek.

Plutôt à conseiller à ceux qui goûtent le rock.

 

2e

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Parvana

Grandir à Kaboul quand on est une petite fille et que son papa vient d'être arrêté, ce n'est pas simple. Parvana, 11 ans, décide donc de se déguiser en garçon pour faire les courses au marché.

La réalisatrice irlandaise Nora Twomey choisit d'entremêler une chronique réaliste de la vie quotidienne avec des visions oniriques illustrant un conte traditionnel. Elle parvient ainsi à atténuer la dureté de ce que vit la petite fille, et donne à voir la puissance de l'imagination.

Les scènes qui se déroulent dans la capitale afghane sont assez réalistes alors que les passages liés à la fable sont travaillés comme des miniatures orientales, un peu dans le style du Michel Ocelot de Azur et Asmar.

Le film se regarde avec plaisir, même s'il faut reconnaître que le scénario un peu trop sage manque un peu d'originalité pour vraiment émouvoir. 

 

2e

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La tendre indifférence du monde

Dès le premier plan (une goutte de sang tombe sur une fleur blanche), on sent que le film ne va ressembler à rien de connu.

La suite va nous conforter dans cette sensation étrange de découvrir un univers : une relation étrangement platonique entre un jeune homme un peu simplet et une beauté toujours vêtue d'une robe rouge, des situations bizarres comme déconnectées de la réalité, de très beaux éclairages artificiels et des éclairs de violence froides qui surprennent. 

La tendre indifférence du monde commence un peu comme du Wes Anderson, avant de faire penser (assez souvent) à l'humour froid et distancié de Takeshi Kitano. On assiste aussi à des poursuites dans un champ de containers qui évoquent Buster Keaton, et le personnage principal cite Camus dans le texte. Bref, le film est un assemblage surréaliste qui ne manque pas de charme.

L'exercice serait un peu vain si le scénario ne devenait pas vers le milieu du film terriblement noir, transformant la fable poétique en chant du cygne et en ode à l'amour fou. Une sorte de Roméo et Juliette au pays de la steppe.  

 

2e

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